jeudi 26 juin 2008

Valse avec Bachir : le choc


Il fait beau, il fait chaud, et moi j'ai des envies de cinéma comme jamais. Et si les prochains films que je vois valent celui-ci, il y a des chances que les critiques publiées se multiplient ici-bas, malgré leur intérêt relatif.



Bref, je vous en prie : si vous n'êtes pas du genre "ciné illimité", et que la Fête du Cinéma revêt encore pour vous quelque signification, courez, courez mes amis, allez voir Valse avec Bachir !
(Il serait en fait même de bon aloi que vous agissiez de la sorte quoi qu'il arrive, fête du cinoche ou pas, carte illimitée ou pas...)



Ce film est donc "de l'avis général", "le grand oublié de Cannes" cette année. A présent que je l'ai vu, je confirme. Mais à la limite on s'en fout.

Il s'agit d'un documentaire animé. Le principe est pour le coup novateur et audacieux.
Ari Folman, le réalisateur, est un Israélien qui a combattu au Liban dans les années 1980 mais, cynisme et méandres troubles de la mémoire, il ne garde aucun souvenir de ces années de combats. Lorsqu'un ami lui fait part de la récurrence d'un cauchemar lié à sa propre expérience de la guerre, Folman décide de retrouver ses camarades de l'époque pour qu'ils lui racontent ce qu'ils ont vécu ensemble, et qu'il puisse à son tour, enfin, se souvenir.



L'animation permet alors de nous montrer ses hallucinations, ses rêves, ses bribes de mémoire qui lui reviennent peu à peu (ce qui serait bien évidemment impossible via un documentaire en prises de vue réelles, qui se contenterait des témoignages actuels et du visage des interviewés.)
Et quelle animation ! Esthétiquement, le film est sublime. Ce que renforce la poignante musique de Max Richter, tantôt rock tantôt classique, qui nous prend aux tripes.
La scène d'ouverture et ses vingt-six chiens enragés pose ainsi le ton d'emblée, nous clouant littéralement à notre fauteuil.



1h27 intense et brutale durant laquelle, sans manichéisme aucun, ni morale assénée, simplement par la simplicité des témoignages et leur mise en image poétique, le message anti-guerre prend toute sa force et son ampleur. Pas question ici de faire de la politique; juste de montrer sans ambages ce qu'est la guerre, parfois avec le sourire, souvent la gorge nouée face à l'horreur. Le processus est fascinant : devant tant d'intelligence et de profondeur, on s'incline.
Le point d'orgue du film, c'est sa fin, qui culmine avec le massacre de Sabra et Chatila, prenant alors, et pour cause, la dimension la plus réaliste et bouleversante qui soit : Folman ôte aux spectateurs leur masque animé. Pour reprendre le discours du film, les pur-sangs arabes sont massacrés, d'une cruauté sans justification aucune : face au désarroi, nous rentrons, au-delà du film et de l'intimité de son réalisateur, dans la dure histoire des hommes.
Non sans émotion : les larmes coulent, toutes seules.




Cette valse macabre magistrale est un chef-d'oeuvre du cinéma, une claque dans ta gueule et dans la mienne, dont la force résonne (et raisonne) longtemps après sa vision, et dont le paradoxe est de donner, avec ses dessins et ses couleurs, beaucoup d'espoir.



mardi 24 juin 2008

Bons baisers de Bruges


Ce film sort demain, je l'ai découvert il y a quatre mois à Los Angeles un peu par hasard, et si je vous en parle ici-bas, c'est pour m'assurer que vous ne vous mépreniez pas sur sa qualité ! On pourrait penser à un énième thriller hollywoodien à la con, il n'en est rien.


Je n'irai pas non plus jusqu'à la comparaison tarantinesque opérée par Télérama sur les affiches, mais je vous recommanderai simplement de faire de ce petit bijou d'humour noir votre priorité ciné du moment.
On démarre classiquement, et puis non en fait, parce que Colin F. est Irlandais, et que l'accent est déjà très dépaysant (V.O. indispensable - comme toujours -); surtout, l'histoire se déroule à Bruges, et toute l'intelligence cinématographique anglo-saxonne concentrée en Belgique, ça vaut son pesant de cacahuètes.
Noir donc, sanglant aussi, mais surtout hilarant, et émouvant tant qu'à faire ! Si si, très fort, je vous assure. Interprètes au poil, rythme d'enfer, réalisation enlevée, image soignée, B.O. qui dépote, cadre original qui fait son effet (en vrai je hais Bruges, personnellement)... Du vrai cinéma décalé, divertissant, efficace et de qualité.

Vous l'aurez compris, je vous encourage vivement à faire un petit tour en Belgique dans les prochains jours, via votre écran - vous ne le regretterez pas.

lundi 23 juin 2008

Ciel mon vélo !

Je suis dans une sorte de grande période Vélib' depuis la semaine dernière, ce beau soleil aidant.


Il faut dire que Ménilmontant a beau être très proche de Gare de l'Est à vol d'oiseau, la desserte en métro est au final assez alambiquée (nord-sud pour aller plein est) - alors qu'à vélo, ça va vite, on prend l'air, on fait du sport, on n'arrive presque pas transpirant au boulot, et on se promène le long du Canal Saint-Martin ! Que du bonheur donc...

Sauf le lundi matin qui suit la Fête de la Musique, lorsque vous vous tapez la moitié du trajet à pied pour cause de vélos détruits, démontés, décharnés... aux six bornes que successivement vous vous acharnez à croiser.

Un vélo, c'est beau, mais il faut parfois mériter son droit de pédaler...
CQFD.

vendredi 20 juin 2008

100%

J'aime les célébrations en tout genre, surtout chiffrées - je me devais donc de consacrer ce centième billet au fait que ce soit le centième billet !


Point de bilan anticipé de ce blog, juste le plaisir d'avoir partagé avec vous de manière plus ou moins efficace, intéressante ou esthétique les choses que j'avais envie de partager ces treize derniers mois. Je ne m'étends pas : s'il y a pu avoir du relâchement dans le rythme de publication, la tendance estivale semble être à l'écriture; pas de rétrospection donc, je repars de plus belle.
By the way, merci pour vos plus de 13 000 visites sur cette période :)

Au passage, je célèbre l'été un chouya en avance, profitant d'un Est parisien qui me charme en tout point (du Canal Saint-Martin à Ménilmontant, en passant par Oberkampf) - et profitant du soulagement récent qu'a apporté la validation presque fingers in the nez de ma quatrième année Sciences Po, grand oral compris.

Du coup, même si le soleil est du genre aléatoire, et qu'on peut craindre une réédition de l'été pourri de l'an dernier, ça brille pour moi, et en ce centième post, je célèbre, je profite !

Merci encore et à très vite.

vendredi 13 juin 2008

"Bon..."

"Bon..." : mon constat amer, hier, exposé à la face de mes contacts Facebook ou Gmail. Une espèce de résignation latente : au quatrième jour du stage, j'étais soûlé. Soûlé de faire le standard et le rangement quand on m'avait assuré que ça ne serait pas le cas, soûlé d'en avoir fini avec lesdits standard et rangement pour ce jeudi, donc soûlé de me faire chier (rien de pire en stage, vraiment), soûlé du coup par la sensation de m'être fait avoir comme un gamin pour ce stage qui n'est pourtant pas le premier.
Pourtant, en fait, un "bon..." lu comme ça peut être évoqué de diverses manières. Et le mien a progressivement glissé du négatif vers le positif. Déjà lorsqu'on m'a redonné du travail, ensuite lorsque je me suis rendu compte que c'était intéressant, enfin après avoir constaté qu'il allait juste me falloir être patient pour le reste, les "bons dossiers" dont j'aurai la charge n'arrivant que d'ici quelques semaines. J'ai retrouvé la pêche !

Et même la banane avec la soirée qui a suivi : le "bon..." est devenu orgasmique !
Tout a commencé la veille en fait : cet apéro "revival L.A." sur les quais avait été bref et frais, mais intense, comme à son habitude; assez malicieux aussi, lorsque le jeune homme et les jeunes filles à notre droite nous ont demandé le tire-bouchon dans un français approximatif, et se sont révélés être... "from California" ! J'adore ces petites connivences de la vie, au quotidien.
Ma mornitude stagesque ayant commencé le mercredi, cette bulle californienne m'avait déjà fait du bien.

Mais ce jeudi soir fut explosif. Juste explosif.
D'abord Ménilmontant-Ternes, sur cette ligne 2 en arc-de-cercle du Nord de Paris, pour retrouver C. et nous diriger chez L., dans l'appartement de malade mental de ses parents, assez inimaginable côté taille et standing. (En revanche la déco peut ne pas faire l'unanimité.)
L., je la connais assez peu : rencontrée à Los Angeles, nous ne nous sommes croisés qu'assez rarement sous les palmiers, et pourtant j'ai toujours énormément apprécié cette fille.
L. a gagné une green card à la lottery américaine, et L. part mercredi s'installer à New York.
Pot d'adieux de dernière minute donc, un délicieux punch et un excellent guacamole coulent à flot, si je puis dire. Nous ne restons pas longtemps, suffisamment pour embrasser L. et être un tout petit peu ivres.

Direction les Champs, où nous devons retrouver G. et J.-B.
Je ne savais pas qu'un Dîner blanc était prévu ce 12 juin. En tout cas, 9000 personnes immaculées, tranquillement en train de souper, assises à table sur les trottoirs de la plus belle avenue du monde entre le Rond-Point et l'Etoile, ça fait son petit effet !
J.-B. est bourré, c'est une catastrophe. Je passe une petite demi-heure avec les trois garçons à errer dans le quartier jusqu'à ce qu'ils s'installent dans leur pizzeria, avant de retrouver ma deuxième partie de soirée.

Je foule à nouveau un tapis rouge car la deuxième partie de soirée sus-citée se manifeste en fait en les personnes de G., S., L. et N. qui sortent de l'avant-première de Seuls Two d'Eric & Ramzy au Normandie. Ils ont réussi à me choper une invite pour la soirée du film!




Rue adjacente, bienvenue au... Queenie (ben voyons) : tarama et champagne à volonté, quelques pontes de "la grande famille du cinéma français", une copine de chez Warner qui me propose de futures soirées sympathiques, et deux-trois people qui traînent : Eric & Ramzy bien sûr, mais aussi Mélanie Doutey et Gilles Lellouche, ou encore François Cluzet. L'occasion de mettre à profit mes talents de photographe de stars développés à Hollywood, et décuplés ce jeudi soir par les quatre coupes de champagne qui se sont mêlées au punch du début de soirée. Je ne suis pas mécontent du résultat, et c'est G. qui est carrément heureuse :


Sur un tel coup d'éclat, nous nous éclipsons, car j'invite G. à la "Take It Irish Party" du festival Close Up créé par Mk2 qui vise à récompenser "les jeunes talents du cinéma français". C'est ma récente collègue J. qui m'a très gentiment repassé les précieuses invitations. La 1, la 14, et hop, Bibliothèque nous voilà ! Au Café du Mk2, le mot d'ordre tire vers le roux et le vert, et G. remplit au moins une des deux conditions. Nous arrivons trop tard pour croiser les membres du jury, Hippolyte Girardot, Olivier Assayas, Aïssa Maïga, Sara Forestier et Florian Zeller; tout comme les nominés Clémence Poésy, Hafsia Herzi, Grégoire Leprince-Ringuet ou le très beau Nicolas Cazalé. En fait, on ne croisera en tout et pour tout que deux "people", mais du vrai "beau" monde au sens littéral du terme : le sexy Johan Libéreau, et le non moins bel écrivain Ariel Kenig. Celui-ci s'est révélé être au demeurant un partenaire de soirée vraiment sympa, et les cocktails fraise que nous avons partagés avec E. et lui avaient une exquise saveur...
En fin de compte, fi des "talents" que G. et moi étions venus débusquer: au-delà du punch, du champagne et de ces lait-fraises alcoolisés, nous nous enfilons encore quelques rhums/vodkas/whiskeys-cocas qui achèvent de nous immerger dans une dimension que nous n'identifions pas véritablement, mais qui est tout à fait plaisante ! 
La musique est excellente, tous ces jeunes gens heureux d'être là, et l'on croise même des comédiens-pizzaiolos fort rigolos. G. est bluffée par la vraie-fausse herbe que nous foulons en terrasse, alors que je me charge de faire découvrir à un charmant Vénézuelien égaré les délices de notre langue (de la mienne en tout cas) - me rendant compte une nouvelle fois par la même occasion que mon espagnol devient presque excellent lorsque je suis alcoolisé ! Il y a vraiment là un concept à creuser...
J., ledit Vénézuelien, m'appellera plusieurs fois dans la nuit, avec, quand même, la phrase du siècle : "G. est super, on a réchauffé ses mains, et c'est ça qui m'intéresse !"
Oui, ça ne veut rien dire, c'est ça qui est drôle, surtout à 5h.

Le maître-mot de cette folle soirée aura donc sans doute été alcool, mais seulement source de beaux et euphoriques moments, qui me permettent alors de m'écrier, d'un air langoureux, heureux et rassuré, (c'est) "Boooon..."

C'est en tout cas la réflexion que je me suis permise dans le taxi qui filait dans la nuit.

mardi 10 juin 2008

Classe !

Dans la continuité du post d'hier, j'ai oublié d'évoquer les magnifiques portraits originaux en noir et blanc de Julie Depardieu et Marion Cotillard, entre autres, qui surplombent mon bureau. Et surtout, j'ai oublié de dire qu'on bossait tous sur Mac ici : la classe !


Bon pour de vrai ce qui est vraiment classe en ce 10 juin 2008, c'est que V. a 30 ans !
V., c'est OneYear, qui a créé son blog il y a un an, décidant d'écrire un article par jour la séparant de la fin de sa vingtaine.
Pari un peu fou, qui aurait pu rapidement être laissé à l'abandon la flemme finissant par la saisir - ou que les lecteurs auraient pu abandonner, pour à peu près les mêmes raisons...
Mais pari gagné, haut la main : si je me considère un lecteur assidu, je n'ai pas lu l'ensemble des 365-et-quelques articles; et si je considère qu'elle écrit très bien, tous les posts que j'ai lus n'ont pas revêtu le même intérêt (assez logique avec une publication par jour !)
Et pourtant, elle a toujours su trouver le parfait équilibre entre dérision et émotion, attachement et agacement, avec pertinence, lucidité et honnêteté, pour nous narrer sans ambages cette année de sa vie. Une année longue, courte, avec ses hauts, ses bas; ses malheurs et ses bonheurs. Une lecture qui nous a tous renvoyés à nous-mêmes à un moment ou un autre de l'année, nous qui ne choisissons d'écrire que quand bon nous semble, ou vous, la fameuse "majorité silencieuse".

Mademoiselle, chapeau bien bas.
Je me joins à tes nombreux supporters pour que tu trouves un nouveau concept original et qu'on puisse continuer à te lire.
Surtout, je te souhaite un excellent anniversaire !!
Je t'embrasse, bravo, et à bientôt...

lundi 9 juin 2008

Au Bureau

C'est reparti pour quinze semaines parisiennes de stage !

Cette première matinée a été un peu dure, rien de grave, juste un peu de mal à se remettre dans le bain, et la désagréable impression que cinq jours de vacances entre le grand'o et le début du stage n'étaient pas suffisants...
Mais il fait beau et chaud, à nouveau, et ça fout la patate ! Ménilmontant est définitivement un quartier très recommandable, des commerces et des bistrots partout, des couleurs, de la vie, une petite église en haut de la rue, une borne Vélib' en face de l'entrée... Je vous invite solennellement à m'y rejoindre pour déjeuner au cours des prochaines semaines.
L'équipe est réduite et très agréable, et si j'ai un peu de mal à tout cerner d'un coup en termes de travail, et que ça me gêne, le stage semble maintenir ses promesses de formation et d'intérêt.
A suivre donc !
C'est sans joie et sans peine que je reprends mon rythme "métro-boulot-dodo" : la routine, déjà ?

mardi 3 juin 2008

Le jour le plus long

On le sait depuis l'entrée en première année, on en remet une couche au début de la quatrième, quand on sait que c'est pour dans quelques mois. Et puis on se laisse vivre, laissant juste le soin à quelques rares piqûres de rappel de nous stresser ponctuellement, "histoire de"...
Viennent les partiels du second semestre, et on sait lorsqu'ils s'achèvent qu'on est qu'à deux semaines de la "chose". On décompresse un chouya des examens (tout de même), avant de replonger dans d'intenses révisions, qui prennent différentes formes : en groupe à la campagne, seul dans sa chambre, ou les deux, ou moins intensément, ou encore différemment...
On se dit qu'on n'est pas vraiment stressé, que le grand oral est justement trop grand, trop vaste, pour être révisé. C'est de la culture générale, et si on est arrivé jusque là, c'est bien qu'on doit la posséder, cette culture gé ! Sans compter nos assidues lectures et analyses de l'actualité toute l'année. On a même joué au Trivial Pursuit lors des fameuses révisions campagnardes, "histoire de".

Sur les 320 étudiants que compte la promo la moitié passait le lundi, l'autre le mardi. J'étais du mardi. Mes deux colocs du lundi. L'angoisse.
L'angoisse véritable est arrivée le dimanche dans l'après-midi, lorsque les camarades du lundi se sont rendus compte de l'échéance toute proche. Elle m'a contaminé. J'ai véritablement vécu 24h de stress intense, tel que je ne l'avais jamais connu. Pas de programme arrêté, donc pas de révisions définies, donc pas de révisions intensives... L'autre chute de ce raisonnement, c'est d'avoir l'impression de ne rien savoir, d'avoir tout survolé. Logique, quelque part, à Sciences Po...
Peut-être logique, mais mes enfants quelle angoisse ! Inégalée, tout à fait.
Et ce lundi est "le jour le plus long" : une journée atroce où, tel un lion en cage, vous attendez, vous attendez - c'est un véritable couloir de la mort dans lequel vous vous trouvez. Vos colocs en reviennent l'un après l'autre, les amis appellent, évoquent leur sujet, leur jury, leurs ratés et leurs succès... Et le temps semble s'être arrêté, refusant catégoriquement de vous mener jusqu'au mardi matin 10h, moment de votre convocation. Vous ne savez plus si vous devez encore lire, ou vous changer les idées. Tout ce dont vous avez envie, c'est de dormir le plus tôt possible, pour raccourcir cette journée terrible où le mouvement semble s'être enclenché pour tous sauf pour vous.
A 22h30, la nuit n'est pas tout à fait noire, mais vous vous couchez enfin, finalement presque déjà soulagé. Le réveil est à 8h, vous vous réveillerez trois fois au cours de la nuit : 1h11, 4h27 et 7h. Vous luttez dans des rêves étranges. Finalement, tel la chèvre de Monsieur Seguin, l'aube vous délivre en la personne de votre réveil. Douche, petit déj', dernières actus à la radio, costard. Pour la première fois de l'année vous êtes en avance. Pas question de suer, vous y allez en métro au lieu des trente minutes de marche à pied habituelles. Mieux vaut profiter de l'avance, des fois que le métro ait des problèmes... Comme la foudre de la veille qui l'a bloqué. Rencontres impromptues qu'on aurait préféré éviter dans ledit métro. Arrivée à Sciences Po. On file repérer son jury affiché sur la porte. Ouf, deux inconnus et un gentil, pas de cerbère en vue. Toujours en avance, les cent pas, ce foutu temps qui n'avance toujours pas, même dix minutes avant le début des réjouissances. Cette boule dans le ventre. On émarge dans le couloir. Les onze de dix heures entrent dans la salle de préparation - les deux sujets au choix ont déjà été tirés au sort et sont retournés sur chaque table.

Dix heures, c'est parti !
"Une VIème République ?" - argh...
Deuxième sujet ?
"Qu'est-ce qu'une guerre juste ?" - bon, pas un orgasme, mais ça me semble plus gérable.
Une heure de préparation ça passe très vite, il faut se foutre dedans tout de suite, pas le temps de rêvasser en regardant le plafond et mordillant son stylo comme en partiels. Idées, arguments, exemples... Je construis mon truc du mieux que je peux. L'heure s'écoule. Chacun des onze rejoint sa salle de jury. J'attendrai un quart d'heure devant la mienne qu'ils achèvent mon prédécesseur. A ce stade de la compète, je me pisse dessus.
La porte s'ouvre enfin, je me lance. C'est un jury Bisounours : une femme, deux hommes, tous relativement adorables. Mon exposé est un peu court (huit minutes sur les dix requises) mais ça passe, et vient alors la partie redoutable et redoutée : vingt minutes de questions acharnées.
Je m'en défends avec honneur.
Tout s'achève.

A la sortie, mon soulagement est incomparable.
Je viens de passer mon grand oral.